Depuis 2010, l’organisation humanitaire Arbeiter-Samariter-Bund Deutschland a.V (ASB) soutient les populations vulnérables en Haïti. Avec l’appui financier du Ministère fédéral de la Coopération économique et du Développement (BMZ), ASB-Haïti a lancé un projet de sécurité alimentaire dans les municipalités de Petit Goâve et Grand Goâve. Ce projet, baptisé « Sécurité alimentaire et résilience grâce à une production adaptée et diversifiée d’aliments sains dans des jardins scolaires et communautaires et à la gestion des risques de catastrophe ». Ce projet, mis en œuvre par l’Association des paysans de Vallue (APV), introduit une initiative novatrice : les jardins garde-manger (JGM) qui vise à augmenter la production locale afin d’améliorer la sécurité alimentaire des familles tout en aidant à restaurer et protéger le sol grâce à son aspect écologique.
Pourquoi les jardins garde-manger en Haïti ?
Les jardins garde-manger sont une alternative aux jardins traditionnels. Ils prennent moins de place et utilisent des techniques agroécologiques durables permettant une production continue de nourriture et particulièrement adaptés aux défis d’Haïti, tels que la rareté de l’eau, la dégradation des terres et les impacts du changement climatique. Au cours de ce présent projet, les JGM ont été mis en place dans 10 écoles pour améliorer la nutrition scolaire, 17 organisations communautaires pour renforcer la capacité de revenus et de services de ces derniers, et au niveau de 350 familles pour améliorer la nutrition et les revenus de des familles.
Avantages Économiques des JGMs
Les jardins garde-manger apportent de nombreux avantages économiques aux communautés locales. En plus de la consommation directe et du partage des récoltes entre les membres des communautés, les agriculteurs vendent une partie de leurs produits, générant ainsi des revenus leur permettant d’acquérir d’autres ingrédients pour la cuisson et répondre à d’autres besoins familiaux et personnels. L’ensemble des écoles et associations pratiquant cette approche ont gagné plus de 70.000 gourdes lors des premières années du projet.
Samuel Banzo, Directeur de l’école communautaire de Pithon, témoigne : « Cette expérience a permis aux élèves et aux professeurs de bénéficier de produits bio pour la cantine tout en développant des compétences en agriculture et en jardinage. Elle nous permet aussi d’avoir suffisamment de récoltes pour vendre et acheter des fournitures pour les élèves. »
Jean-Louis Evens, membre de l’Òganizasyon Peyizan Malfini (OPM), partage son expérience : « Le jardin renforce l’économie de notre organisation et encourage même les membres qui envisageaient de quitter l’organisation d’y rester. »
Janel Rathon, élève de 17 ans à l’école communautaire de Pithon, ajoute : « Avec le jardin garde-manger, je récolte davantage. Les produits servent à notre alimentation, au partage avec nos voisins, et parfois à la vente. »
Protection de l’Environnement et impact Écologique
L’approche inclut des formations pour enseigner aux agriculteurs des méthodes de protection des sols contre l’érosion. Ces techniques permettent d’améliorer la productivité tout en respectant l’environnement.
Le directeur de l’école communautaire de Pithon note également : « Les élèves ont appris à protéger la terre, à lutter contre l’érosion du sol et à l’enrichir. C’est un travail purement technique où les élèves apprennent à entretenir et cultiver un jardin de A à Z. »
Impact Communautaire et Éducatif
Les jardins garde-manger ne se limitent pas à améliorer la sécurité alimentaire et l’environnement, ils jouent également un rôle clé dans l’éducation et la cohésion sociale. Ces jardins sont devenus des outils pédagogiques puissants pour les écoles, offrant aux élèves des compétences pratiques en agriculture durable tout en favorisant un sentiment d’appartenance et de responsabilité communautaire.
Valsaint Fritz, directeur de l’école communautaire Notre Dame du Perpétuel Secours à Durissy, témoigne :
« Nous avons commencé par une formation théorique pour les élèves, puis nous avons mis en pratique en créant un jardin. Les récoltes sont utilisées dans la cantine scolaire, offrant des
aliments sains aux élèves. Le jardin nous permet de cultiver plusieurs variétés sur une petite surface, ce qui est une vraie révolution comparée aux méthodes traditionnelles. »
L’impact va au-delà des murs des écoles. Les familles et les communautés s’impliquent, voyant les avantages concrets de ces jardins. Jean-Louis Murat, secrétaire de l’Association des paysans de Lassource (APL), souligne : « Grâce à ASB, la plupart des membres de notre association ont maintenant leur propre jardin garde-manger, même ceux qui ne sont pas bénéficiaires directs du projet, ont vu les résultats et veulent en faire partie. »
Cet engagement communautaire renforce la cohésion sociale, avec des familles partageant leurs savoir-faire et leurs récoltes. Le projet crée ainsi un effet d’entraînement, motivant de plus en plus de personnes à adopter ces pratiques agricoles innovantes et durables.
La nécessité d’étendre l’approche de jardins garde-manger dans d’autres communautés du pays.
L’approche de jardins garde-manger est une initiative révolutionnaire qui a un impact profond sur la sécurité alimentaire, l’économie locale et la protection de l’environnement. Grâce à l’engagement d’ASB et au soutien financier du BMZ, ce projet a permis d’améliorer les conditions de vie de nombreuses familles haïtiennes, tout en promouvant des pratiques agricoles durables et respectueuses de l’environnement.
Les témoignages des bénéficiaires nous montrent que les jardins garde-manger ne sont pas seulement une solution temporaire, mais une stratégie à long terme pour lutter contre la faim et la pauvreté. En renforçant les capacités locales et en favorisant la résilience climatique, cette approche offre un modèle à suivre pour d’autres régions du pays et au-delà.
Pour que cette approche continue de prospérer et d’intensifier son impact, il est crucial de trouver des fonds additionnels afin d’étendre nos activités dans d’autres régions du pays. « L’absence de fonds suffisants limite notre capacité à toucher tous un nombre de paysans plus conséquent, mais à travers ceux qui ont bénéficié du soutien de ce présent projet, nous constatons déjà un impact positif. De plus, ceux qui n’ont pas encore de jardins expriment un vif désir d’en établir un » déclare l’agronome James Delzilus, qui travaille sur le projet.
L’extension des jardins garde-manger dans d’autres communautés et écoles pourrait transformer encore plus de vies, en fournissant des outils et des connaissances nécessaires pour une agriculture durable et productive.